
Concernant les atteintes organiques, l’accent avait été mis sur certaines pratiques thérapeutiques comme les transplantations, qui soulevaient de nombreuses questions, aussi bien en histoire de la civilisation qu’en histoire des sciences, par exemple la question des gestes de manipulation des organismes vivants en vue d’effets alimentaires ou esthétiques (
F. Delaporte). De même, l’histoire du médicament avait été suivie en lien avec les théories du remède. L’enquête sur les pratiques thérapeutiques sera poursuivie dans plusieurs directions : histoire de l’exploration pharmacologique depuis l’époque moderne, histoire de la toxicologie et de la pharmacodépendance (concept d’addiction), histoire des thérapies ciblées, histoire de la phytothérapie et de la matière médicale. L’histoire du sang, dans ses dimensions médicales et thérapeutiques, mais aussi symboliques et religieuses sera entreprise (
J.-C. Dupont).
À l’articulation des recherches en neurosciences, en neurologie et en psychiatrie, l’histoire des maladies neurodégénératives et neuropsychiatriques sera développée selon trois perspectives. Les liens entre le cerveau, le développement des techniques exploratoires et la médecine seront suivis dans un cheminement historique et épistémologique qui mène de la découverte physiologique de l’excitabilité nerveuse à la neurochirurgie et à la stimulation cérébrale profonde. La thématique de l’existence de frontières entre neurologie et psychiatrie sera explorée : ces frontières possèdent elles une essentialité ? Ne sont-elles pas déterminées par une structure épistémologique à l’origine de différentes appréhensions des maladies mentales ? Enfin les techniques de stimulation cérébrales sont-elles seulement des outils thérapeutiques ou des instruments de recherches fondamentales sur la physiologie cérébrale ? (
C. Cherici)
Certains « modèles » qui sous-tendent les pratiques de soin psychique, et les théories qui les soutiennent ou qui en émanent, dans leur contexte historique d’émergence et d’un point de vue épistémologique seront analysés. Deux terrains cliniques et deux formes de pathologies sont privilégiés dans cet examen des pratiques et logiques de « santé mentale », permettant notamment d’interroger certaines articulations entre psychothérapies, théories de la personne, et société : les « pathologies du travail », et certains types de « remèdes » relevant notamment du paradigme du « bio-psycho-social » ; les « nouvelles pathologies », appréhendées comme pathologies narcissiques et pathologies de l’idéal, qui peuvent s’analyser comme défaillances des processus d’institution du sujet et faisant l’objet de nouvelles normativités. La perspective qui fédère ces considérations sur diverses formes de thérapeutiques visant la santé mentale, est la mobilisation et la manipulation particulière de ce « lien » qui désigne l’articulation du psychique et du social/culturel. La notion de lien correspond ici à la métaphorisation des écarts entre l’interne et l’externe (cette représentation en termes d’espaces distincts et hétérogènes étant elle-même sujette à questionnement). Et nous interrogerons en particulier les contributions de différents sous-domaines de la psychologie à ces descriptions et usages du lien, depuis les représentations plus humanistes datant des siècles précédents, jusqu’à des orientations plus instrumentales caractéristiques de notre culture dite « hypermoderne ». Différentes théories du lien seront sollicitées, depuis la notion d’espace transitionnel chez D. Winnicott, celle d’habitus issue de différentes sociologies (N. Elias, P. Bourdieu), jusqu’à celles développées par R. Kaës des alliances structurantes et défensives, et plus largement les travaux relevant de l’anthropologie psychanalytique (C. Castoriadis, P. Legendre), d’une part, et de l’anthropologie phénoménologique d’autre part (M. Henry, P. Ricœur). (projet porté notamment par
P. Spoljar)