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Centre d'histoire des sociétés, des sciences et des conflits

Conflits armés

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L’étude des conflits armés, à comprendre essentiellement au sens de conflits guerriers, inter ou intraétatiques est un des axes prioritaires du CHSSC. Le champ chronologique des chercheurs et chercheuses du laboratoire s’étend de l’époque moderne aux conflits armés les plus récents, notamment à travers des approches comparées des expériences de guerre (groupes sociaux : femmes, enfants ; réfugiés et populations mobiles ; trauma et violences de guerre ; pratiques et cultures alimentaires), croisées avec leurs représentations.

L’étude de la Première Guerre mondiale est une des spécialités du CHSSC, dont les chercheurs et chercheuses ont lancé de nouveaux chantiers à l’occasion de la commémoration du Centenaire de la Grande Guerre entre 2013 et 2019, concernant notamment la jeunesse ou le ravitaillement alimentaire civil et militaire.

Les chercheurs et chercheuses du CHSSC ont également une expertise en matière d’histoire publique à travers des activités de valorisation de la recherche (expositions, conférences, commémorations nationales), soutenues notamment par la MESHS Hauts de France ou le CPER Anamorphose Patrimoine. De nombreuses collaborations ont lieu avec le Centre International de Recherche de l’Historial de la Grande Guerre de Péronne pour des conférences, journées d’étude, colloques et séminaires doctoraux. Plusieurs membres du laboratoire ont également pu inscrire leurs recherches dans une histoire renouvelée de la guerre franco-prussienne à l’occasion de son 150e anniversaire, et sont impliqués dans les commémorations du 80e anniversaire de la Libération.

Cet axe de recherche s’articule autour de différentes thématiques : États en guerre ; Sociétés en guerre ; Trauma et violences de guerre ; Représentations des conflits armés.

États en guerre


Cet axe s’intéresse aux différentes formes de mobilisation des États dans le cadre des conflits armés de l’époque moderne à nos jours, notamment dans le cadre des sièges de l’époque moderne et des guerres totales.

Afin de mieux comprendre en quoi la guerre est, à l’époque moderne, un attribut fondamental de souveraineté, Isaure Boitel a co-organisé en 2023 un colloque international au château de Versailles sur l’incarnation militaire du pouvoir à l’échelle européenne. Cette rencontre a profité des trente ans de parution de l’essai de Joël Cornette, Le roi de guerre, pour examiner la valeur heuristique de ce concept en explorant comment se manifeste concrètement et symboliquement la puissance martiale.

En lien avec l’axe 2, les recherches de Camille Desenclos s’intéressent, en sus de la séparation du secrétariat d’État de la Guerre de celui des Affaires étrangères au tournant du XVIIe siècle, aux pratiques de renseignement et, en particulier, aux pratiques cryptographiques françaises. Il s’agit de comprendre, d’un côté, les raisons de la faible part des chiffres militaires dans les archives de la première modernité et, de l’autre, le rôle joué par les conflits, internes (guerres de Religion) comme extérieurs (guerres d’Italie, guerre franco-espagnole, guerre de Trente Ans) dans la construction et évolution de la pratique cryptographique.

Pour la Première Guerre mondiale, les travaux menés et les recherches en cours interrogent, dans une perspective comparative, les politiques locales, nationales ou supranationales (coalitions militaires). Les politiques mises en place par les Alliés dans différents domaines (aide humanitaire, approvisionnement alimentaire) sont ainsi envisagées en lien avec les dynamiques de la guerre totale, différemment appréhendées par les forces de l’Entente et les Puissances centrales. Emmanuelle Cronier, dans ses recherches sur l’approvisionnement alimentaire dans les pays alliés pendant la Grande Guerre, s’intéresse ainsi aux réponses différenciées apportées par les belligérants aux enjeux de sécurité alimentaire, qui ont été des facteurs de la victoire alliée.

L’étude des services aux armées, de l’époque moderne à la période contemporaine, a mobilisé plusieurs membres du CHSSC autour du ravitaillement et de la logistique, comme par exemple le travail d’HDR de Marion Trévisi (mai 2024) qui porte notamment sur les cantinières et suiveuses des armées de l’époque moderne du XVIe au XVIIIe siècle, ou celui d’Emmanuelle Cronier consacré à la consommation de viande au front pendant la Première Guerre mondiale. Les services aux armées sont aussi abordés à travers la question des aumôniers militaires, objet d’étude de Xavier Boniface et d’un travail de thèse mené au sein du laboratoire.

Les chercheurs s’intéressent également à la conduite de la guerre et de la vie politique pendant les conflits armés. Dans la sphère militaire, des études portent sur le commandement, dont plusieurs thèses récemment soutenues, et, plus largement, sur l’adaptation des cultures militaires aux dynamiques de la guerre totale. Une seconde direction étudie la vie politique et les politiques publiques à différentes échelles. La publication par Philippe Nivet du journal du député Henri Galli pendant la Première Guerre mondiale a ainsi contribué au renouvellement de l’histoire parlementaire et politique de la France entre 1914 et 1918.

Sociétés en guerre

Les travaux des membres du CHSSC s’inscrivent dans une réflexion sur la manière dont les conflits armés révèlent ou accélèrent les transformations sociales à travers l’étude des pratiques et des représentations, en lien avec les enquêtes menées dans l’axe 2 sur l’histoire politique. En particulier, ils s’intéressent à la manière dont les valeurs, les normes et les prescriptions du temps de guerre s’inscrivent dans une économie morale du sacrifice.

Les questions de genre et les effets de générations font partie des expertises spécifiques de plusieurs membres du laboratoire.

À la croisée de l’histoire du genre et de l’anthropologie de la guerre, l’habilitation à diriger les recherches de Marion Trévisi (2024) sur les femmes et la guerre en France à l’époque moderne s’insère dans la continuité de ses travaux sur les suiveuses des armées et les combattantes des sièges. À partir d’écrits personnels (mémoires, lettres de soldats), d’archives militaires (procès, dossiers militaires de combattantes) ou de journaux de siège, cette recherche dévoile les raisons du choix des armes pour ces femmes ou celles d’une vie d’errance à la suite des armées françaises. Marion Trévisi cerne l’importance des femmes dans l’économie de guerre, en étudiant le rôle des cantinières, vivandières et prostituées, à l’arrière des troupes et autour des casernes. En marge des combats, celles-ci profitent, en effet, de la guerre pour gagner leur vie et même, parfois, pour faire carrière, notamment par le biais du pillage, créant une économie parallèle féminine.

L’habilitation à diriger des recherches de Manon Pignot (2018) s’est attachée à mettre au jour un angle mort de l’historiographie de la Première Guerre mondiale, celui des adolescents, trop jeunes pour s’engager légalement, mais trop vieux pour se contenter d’une mobilisation scolaire symbolique. Cette étude, menée à l’échelle européenne, contribue à la fois à l’historiographie du phénomène guerrier et à celle d’une classe d’âge, pensée en termes de génération. 

Le projet de recherche de Clémentine Vidal-Naquet propose d’étudier l’expérience de la vieillesse dans la Première Guerre mondiale dans trois pays européens : l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne. Il entend regarder la guerre du côté des populations âgées en concentrant l’analyse sur les expériences - économique, sociale, affective, physique - des acteurs sociaux et en plaçant au cœur de l’interrogation la question des sensibilités. Ce projet souhaite saisir la multitude des expériences sociales quotidiennes de la vieillesse pendant la guerre, selon les situations sociales, les espaces, les temporalités du conflit, le genre, les liens avec les combattants et les modes de prise en charge publique. Première étude comparative sur l’expérience de guerre des membres les plus âgés des sociétés belligérantes, cette recherche interroge aussi la Grande Guerre comme moment particulier dans la construction sociale de la vieillesse. L’article de Philippe Nivet, « Henri Galli, un père politique en deuil pendant la Grande Guerre », s’inscrit dans cette réflexion sur les personnes âgées pendant la Grande Guerre.

Emmanuelle Cronier s’intéresse, quant à elle, aux enjeux de sécurité alimentaire dans le cadre des conflits armés de la période contemporaine, particulièrement pendant la Première Guerre mondiale, dans une approche comparée de l’approvisionnement civil et militaire et de l’adaptation des sociétés aux contraintes de la guerre totale, qui accélèrent aussi la modernisation des systèmes alimentaires. Dans ce domaine, la guerre retravaille les questions de genre attachées à l’alimentation. Si, dans tous les pays belligérants, des injonctions nouvelles pèsent sur les femmes, poussées à rationaliser achats et consommation alimentaires au titre de leur participation à l’effort de guerre, les mobilisés deviennent des acteurs importants du ravitaillement militaire, de la corvée d’épluchage aux cuistots du front.

L’expérience de guerre de groupes sociaux plus restreints a fait ou fait l’objet d’études au sein du CHSSC. La thèse de David Hager (entamée en 2020) porte sur « les bombardements des villes françaises éloignées du Front pendant la Première Guerre mondiale ». Prolongeant le travail d’Alex Dowdall, la recherche de David Hager vise à étudier les bombardements et leurs conséquences sur Paris et plusieurs grandes villes ou villes moyennes de l’Est et du Nord de la France, notamment Belfort, Nancy, Bar-le-Duc, Châlons-sur-Marne, Epernay, Beauvais, Amiens, Abbeville, Boulogne, Calais et Dunkerque. Cette recherche se situe au confluent de l’histoire militaire, de l’histoire des politiques publiques, de l’histoire sociale, de l’histoire culturelle et de l’histoire des mentalités. Les objectifs des bombardements, leurs cibles, l’action des préfets et des maires, la réaction des populations, entre résilience et fuite, sont étudiés, de même que la représentation et la médiatisation des bombardements.

Le CHSSC s’est également intéressé à la question des sorties de guerre, en particulier celle des “pélerinages” et du tourisme de champ de bataille. À l’occasion du colloque “Le voyage de l’Antiquité à nos jours” organisé en 2020, dans le cadre de la SFR “Territoires historiques” (publié ensuite par Shaker Verlag en 2022), Philippe Nivet a étudié le tourisme de champ de bataille de la Somme après la Première Guerre mondiale, tandis qu’à partir d’un épais album photographique conservé à l’Historial de la Grande Guerre de Péronne Clémentine Vidal-Naquet a étudié le voyage de noces du couple Debaecker dans les territoires dévastés, où le mari avait auparavant combattu. Le CHSSC a également été l’un des organisateurs du colloque international “Les pèlerinages sur le front occidental de la Première Guerre mondiale : de la fin de la guerre aux pratiques contemporaines”, tenu dans l’Aisne (Caverne du Dragon et Château-Thierry) les 19 et 20 octobre 2023, avec des interventions de Benjamin Gilles (“Retour à Verdun, les significations du pèlerinage de Jean Norton Cru”) et de Clémentine Vidal-Naquet (“Intime et sortie de guerre : des voyages de noce sur le front occidental”).

La thèse de Colin Marais, soutenue en 2023, étudie l’impact de la Seconde Guerre mondiale sur les terra-neuvas de Fécamp. Fécamp et ses hommes de mer subissent, en effet, de plein fouet la déclaration de guerre avec le Reich. Certains Fécampois participent à l’exode. D’autres restent sur place, tandis qu’une partie des équipages se retrouve bloquée à Saint-Pierre-et-Miquelon (qui ne rallie la France libre qu’à la fin de l’année 1941, c’est-à-dire tardivement car le lien avec les Antilles de l’amiral-gouverneur Robert – ultra-vichyste – reste complexe) ou en Angleterre, d’où quelques-uns rallient le général De Gaulle. Une partie de ceux restés à Fécamp continue la pêche bordurière, tandis que d’autres trouvent dans les riches eaux de l’AOF administrée par le très vichyste Pierre Boisson, l’occasion de continuer leur métier, tout en changeant de pratique de pêche. Cette période s’achève par la destruction quasi-totale de la flotte de pêche normande au début de la Libération. Celle-ci doit trouver, rapidement, le moyen de se réorganiser pour alimenter en morue – le cabillaud séché et salé – la population d’un pays ruiné par la guerre. La sortie de guerre et la reconstitution de la flotte de pêche – jusque dans les années 1950 – sont donc analysées par Colin Marais.

Les sociétés en guerre, ce sont aussi leurs composantes religieuses, grâce à l’étude des clergés et des croyants, menée par Xavier Boniface, en particulier pour la Grande Guerre, mais aussi pour le second conflit mondial, à travers sa participation au programme ANR Globalvat, sur les archives du pontificat de Pie XII. La thèse de Werner Schönfeld, soutenue en décembre 2023, a permis de préciser le rôle des aumôniers allemands pendant le conflit, en se focalisant sur les cadres de l’aumônerie, quelle que soit leur religion, et sur leur rôle dans les territoires occupés.

Beaucoup de ces études mobilisent les témoignages et plusieurs publications, dans une collection intitulée « Vécus » chez Encrage Éditions, dirigée par Philippe Nivet, témoignent de l’intérêt maintenu des chercheurs du CHSSC pour les écrits du « for privé ». Publiés par Philippe Nivet, les journaux rédigés par l’Orléanaise Claire Geffrier, par la Compiégnoise Germaine Valentin et par la Roubaisienne Marie Masquelier ont ainsi éclairé l’expérience de l’occupation et/ou de l’exil par des jeunes femmes au cours de la guerre 1870-1871 et de la Première Guerre mondiale.

S’il apparaît clairement que les chercheurs du CHSSC ont davantage travaillé sur les civils, les combattants ont également donné lieu à un certain nombre de publications. Dirigée par Philippe Nivet, avec notamment la collaboration de Marjolaine Boutet , l’étude sur Les Français dans la bataille de la Somme (Encrage, 2018) a montré que les batailles de la Somme, singulièrement celle de 1916, n’ont pas été des batailles exclusivement anglo-saxonnes, comme pourrait laisser le croire une certaine mémoire, mais qu’elles ont vu également l’engagement de troupes françaises. Le livre comporte, en particulier, une analyse, menée par Philippe Nivet, de l’état d’esprit des soldats français dans la bataille de la Somme de 1916, rédigée notamment à partir des archives du contrôle postal. Pierre Servent, qui a soutenu une thèse sur travaux au sein du CHSSC, a consacré son mémoire inédit à l’un des 1061 Compagnons de la Libération, Adrien Conus. Le sous-titre de cette recherche, Des combats de la France Libre à ceux de l'Indochine : itinéraire singulier et archétypal d'un soldat "irrégulier", montre l’ambition de l’auteur d’analyser les batailles dans lesquelles Conus a été engagé, mais aussi d’évoquer le monde du renseignement. La thèse d’Olivier Desfachelles, Le commandement pendant la guerre civile américaine 1861-1865, soutenue en 2019, interrogeait, au prisme des concepts clausewitziens de « friction » et de « brouillard », les commandements dans les deux armées, soulignant le volume des dissensions, des rivalités, des jalousies qui ont traversé les commandements. Enfin, la thèse en cours de David Hager, déjà évoquée pour la composante « histoire sociale », comprendra des développements sur les opérations aériennes au cours de la Première Guerre mondiale, que l’on peut rattacher à l’étude du monde combattant et des pratiques militaires.

Trauma et violences de guerre

Les violences de guerre sont au cœur de la réflexion de plusieurs chercheurs et chercheuses du CHSSC, à la croisée de l’histoire, de l’anthropologie historique et des sciences de la psyché, pour interroger la manière dont les populations civiles et militaires ont pu y faire face, de l’époque moderne à la période contemporaine. Cette réflexion est ancrée dans le dynamisme des champs de recherche s’intéressant aux sorties de guerre et aux mémoires, invitant à repenser le cadre chronologique des travaux menés sur les guerres totales en particulier.

La question de la prise en charge des victimes de guerre recoupe les recherches menées dans l’axe 1 sur l’histoire et l’épistémologie des sciences et de la médecine.

Le projet de recherche interdisciplinaire « LettresCamps », dirigé par Dimitra Laimou, a démarré en mai 2022, soutenu par la MESHS Hauts de France, le CNRS Hauts-de-France (projets structurants) et l’International Psychoanalytical Association, en partenariat avec le Mémorial de la Shoah, le Mémorial de l’internement et de la déportation (camp de Royallieu) et le Musée Juif d’Athènes. Des chercheurs du laboratoire “psychologie clinique, psychopathologie, psychanalyse” (UR 4056) de l’Institut de Psychologie (Université de Paris) y collaborent également. Cette étude a trois objectifs. Elle vise l’anlyse des fonctions de l’écriture dans les conditions extrêmes, en prenant comme paradigme la correspondance d’internés juifs dans les camps nazis en France, pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle examine le rôle de la lettre dans l’élaboration du traumatisme inter et transgénérationnel à travers l’étude de la fonction que ces lettres ont acquise au fil des années pour les proches et les descendants des internés. Enfin, elle appréhende la lettre dans ses potentialités de transmission pédagogique.

Ces enjeux croisent les travaux menés par Céline Masson et Yaëlle Malpertu sur la fonction des objets “transmissionnels” (notion forgée à partir de “transmission” et “transitionnel”) appartenant à des familles juives, descendants de rescapés de la Shoah ou eux-mêmes enfants cachés. Ce travail s’inscrit dans le cadre de l’opération de collecte des archives du Mémorial de la Shoah intitulée « Confiez-nous vos archives familiales », débutée en 2014 et qui a permis le recueil d’objets et de documents, publics et privés, précieux autant pour l’Histoire que pour la Mémoire. Très fructueuse, cette collecte a été l’occasion de rencontres, de témoignages rares, d’acquisitions inestimables de documents et d’objets. Dans le cadre de ces travaux, Céline Masson et Yaëlle Malpertu mènent également des entretiens auprès des personnes qui souhaitent conserver ces objets, témoins de la vie d’avant la Shoah, souvenirs d’un parent déporté voire assassiné dans les centres nazis d’extermination. Elles analysent ces objets mémoriels, parfois non exploitables par les historiens, mais porteurs d’une histoire, de souvenirs, de traces d’une vie avant la Shoah.

La thèse de Damien Dervois, co-encadrée par un psychologue (Philippe Spoljar) et par un historien (Xavier Boniface), Au croisement des processus mémoriels collectifs et individuels : les ressorts de la transmission du trauma chez les Harkis, interroge les identifications parentales ayant étayé la construction psychique des enfants de Harkis et leurs projections identitaires au sein de la société française. Elle s’inscrit dans la continuité de la réflexion des chercheurs du CHSSC sur la transmission intergénérationnelle des traumatismes de guerre, sur laquelle avait déjà travaillé Caroline Dingeon, restée en relation avec le CHSSC, dans sa thèse soutenue en 2014 sur La subjectivation de l'héritage traumatique de la Première guerre mondiale dans les régions du nord et de l'est de la France.
 

Représentations des conflits armés

Les chercheurs et chercheuses du CHSSC explorent les représentations du temps de guerre à travers des corpus variés, dans une approche comparative : témoignages, presse, iconographie (gravure, photographie, affiche), culture populaire (chanson, roman, carte postale, cinéma, télévision, séries, bande dessinée), littérature.

Marjolaine Boutet, membre du CHSSC de 2018 à 2022, a consacré une large partie de ses recherches à la représentation des conflits dans les séries télévisées. Le mémoire inédit pour l’habilitation à diriger des recherches, soutenue en 2021, intitulé Faire écran : les réécritures de la Seconde Guerre mondiale dans les séries télévisées au temps de la guerre froide et publié en 2023 aux Presses universitaires du Septentrion avec le soutien du CHSSC, analyse un corpus de près de 450 heures de film, composé de treize séries télévisées situées explicitement pendant la Seconde Guerre mondiale pour la majeure partie de leur diégèse et dont la diffusion a commencé avant la chute du mur de Berlin : cinq séries américaines, en particulier Holocaust, cinq séries britanniques, deux séries françaises et une série allemande, Heimat. Dans ce travail d’HDR, Marjolaine Boutet montre que « ces séries parlent bien plus des sociétés occidentales du second vingtième siècle que de la guerre qu’elles prétendent raconter ».

Les projets d’Isaure Boitel explorent la culture visuelle des sociétés en guerre à l’époque moderne en appréhendant à la fois la production, les significations et la réception des images conçues en temps de conflit. Confrontant les points de vue de différents belligérants européens, elle analyse, par exemple, les figurations des affrontements en interrogeant non seulement les représentations symboliques et métaphoriques, mais aussi le caractère réaliste et/ou idéalisé des scènes de bataille.

Olivia Carpi interroge le rapport entre les représentations artistiques et mentales des guerres de Religion à travers l’étude de médias de la culture populaire (cinéma, télévision, roman, BD), en particulier une série télévisée diffusée sur Antenne 2 en 1988, réalisée par José Dayan et la saison 2 de la série diffusée sur France 5, La guerre des trônes. L’objectif de ces travaux consiste à mettre au jour l’archéologie des représentations contemporaines, largement stéréotypées, des guerres de Religion et leur articulation avec les idéologies dominantes des sociétés dans lesquelles elles sont produites.

Pour la période contemporaine, Emmanuelle Cronier a étudié la manière dont les différents supports de la culture de masse participent, pendant la Première Guerre mondiale, aux dynamiques de sécurité alimentaire mobilisant, au quotidien, les civils dans l’effort de guerre collectif, à travers les efforts de restriction et de rationalisation qui se jouent dans l’espace domestique. Elle a ainsi contribué à un programme de recherche du centre d’histoire du XIXe siècle de la Sorbonne et de la BIS sur les cartes postales de la Grande Guerre, par une publication sur le thème “L’alimentation dans les cartes postales. Pénurie et cultures de guerre pendant la Première Guerre mondiale” (2021, CNRS Éditions).

Les dynamiques des cultures de guerre sont aussi au cœur de travaux de Clémentine Vidal-Naquet, qui termine de rédiger un ouvrage centré sur un album photographique relatant le voyage de noces d’un couple en 1919. Imaginée par l’époux, ancien mobilisé ayant tout juste repris ses habits civils, la lune de miel a lieu dans les champs de bataille et les ruines de la France du Nord et de la Belgique. Ce périple conjugal sur les traces de la guerre de l’ancien combattant permet de questionner, à nouveau frais, les façons de dire le conflit et sa violence.

Xavier Boniface s’est, quant à lui, intéressé à la mémoire, religieuse entre autres, des conflits de 1870-1871 et 1914-1918, et à leurs représentations auprès des militaires eux-mêmes.

Pour certains de ces chantiers, les historiens du CHSSC (Philippe Nivet, Juliette Sauvage, doctorante) ont collaboré avec des spécialistes de la littérature (équipe de recherche CERCLL) pour étudier la manière dont l’écrivain Roland Dorgelès a traité la guerre et l’après-guerre (notamment la Reconstruction) dans ses différents ouvrages, en particulier Les Croix de bois et Le Réveil des morts : ces deux chercheurs ont contribué à la réédition, précédée d’une préface scientifique, de ce dernier roman, parue fin 2023.

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